Vers des matériaux capables de résister aux détonations rotatives.

Publié par Christian Chauveau, le 7 janvier 2025   16

Le projet Détotech de l’ARD MATEX vise à trouver des matériaux capables de supporter les contraintes extrêmes subies par un moteur à onde de détonation, où la durabilité des matériaux actuellement employés est mise à rude épreuve. À la manœuvre, les laboratoires CEMHTI et ICARE du CNRS à Orléans, en partenariat avec MBDA France à Bourges.

Le concept de propulsion par détonation, qui consiste à faire se propager une onde de choc réactive dans un moteur pour générer une poussée, est au cœur du projet Détotech. Cette technologie futuriste suscite un regain d’intérêt dans le monde entier. Elle permettrait une réduction significative de la consommation de carburant, un atout majeur dans le contexte actuel de transition énergétique. Mais les ingénieurs sont confrontés à différents verrous technologiques et scientifiques, en particulier la conception de solutions matériaux capables de résister à un tel environnement pendant de longues durées. Dans ce type de moteur, appelé RDE (Rotating Detonation Engine), des ondes de choc consomment instantanément le mélange carburé en tournant à plusieurs kilomètres par seconde !

Ce projet de recherche, lancé en 2022, dans le cadre du programme régional ARD MATEX (Ambition Recherche et Développement multi matériaux en conditions extrêmes), réunit les laboratoires orléanais CEMHTI (Conditions Extrêmes et Matériaux : Haute Température et Irradiation) et ICARE (Institut de Combustion, Aérothermique, Réactivité et Environnement) du CNRS, ainsi que l’entreprise MBDA France qui a déjà réalisé à Bourges des essais sur ces moteurs, mais pour des durées limitées à quelques secondes.

Des moyens techniques de pointe

« Nos recherches consistent à caractériser des matériaux soumis à des pressions, des températures et des chocs extrêmes. Nous travaillons avec des échantillons représentatifs et nous les soumettons à des conditions parfaitement maîtrisées », explique Cécile Genevois, ingénieure de recherche au CEMHTI. Et pour mener à bien cette étude, le CEMHTI et ICARE disposent de moyens techniques de pointe, permettant de recréer en laboratoire les conditions auxquelles les matériaux sont exposés. « Nous utilisons un jet de plasma à très haute vitesse, atteignant des températures très supérieures à 2500 degrés Kelvin et des vitesses de l’ordre de Mach 4, soit quatre fois la vitesse du son », détaille Viviana Lago, ingénieure de recherche à ICARE.

Ces tests permettent de « martyriser » les matériaux en les soumettant à des contraintes extrêmes pour comprendre comment ils se comportent. « Nous cherchons ainsi à étudier comment le matériau est organisé, structuré et comment les hautes températures et hautes pressions vont modifier sa structure. Nous utilisons des techniques allant de la simple observation visuelle à l'analyse nanométrique, grâce à des outils tels que la diffraction des rayons X ou les microscopies électroniques », précise Vinciane Reynaud, postdoctorante au CEMHTI.

À terme, il s’agit de développer une solution matériau capable de résister à ces conditions extrêmes, ce qui permettrait d'augmenter la durée de vie des moteurs et d'améliorer leur performance, dans divers domaines tels que l’aérospatial.