Télescope intérieur, une œuvre dans l'Espace
Publié par Joris Bossard, le 9 avril 2020 1.1k
Télescope intérieur, une œuvre dans l'Espace
Lors de sa mission scientifique comportant une soixantaine d’expériences, l’astronaute Thomas Pesquet a également réalisé une performance artistique conçue spécialement pour l'apesanteur : une œuvre imaginée par l'artiste Eduardo Kac. Un film de Virgile Novarina retrace cette aventure spatiale et poétique.
Depuis une dizaine d’années, l’artiste américain Eduardo Kac se demande quelles formes d’art spécifiques pourraient exister dans l’Espace, sans pour autant transposer une œuvre d’art réalisée sur Terre : Quelles nouvelles expériences artistiques et poétiques l’apesanteur pourrait-elle permettre ? Ses réflexions l’ont conduit à créer une forme en trois dimensions, n’ayant ni haut ni bas, et porteuse de nombreuses significations différentes selon l’angle sous laquelle elle est vue. Une œuvre pensée pour flotter dans l’espace avec son spectateur, lui aussi en apesanteur…
Eduardo Kac et Thomas Pesquet au Centre d'entrainement des astronautes de Cologne, Allemagne. ©Virgile Novarina, ESA, CNES
Cette démarche a tout de suite séduit Thomas Pesquet, qui a accepté de réaliser cette expérience artistique lors de son séjour de six mois à bord de la Station Spatiale Internationale. Un film de Virgile Novarina intitulé « Télescope intérieur, une œuvre spatiale d’Eduardo Kac » (35’, Observatoire de l’Espace) retrace toute cette aventure, depuis l’atelier d’Eduardo Kac à Chicago jusqu’au module Colombus de la Station Spatiale Internationale, en passant par le centre d’entrainement des astronautes de Cologne en Allemagne, et par le cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan.
Auparavant, des œuvres d’art avaient déjà été apportées dans l’Espace, mais cette fois, il s’agissait de créer une œuvre nouvelle à bord de la Station Spatiale Internationale, une œuvre qui ne prend son sens que dans cet environnement si particulier. Composée de matériaux très simples et disponibles à bord de la station, « Télescope intérieur » consiste en un découpage et un assemblage de deux feuilles de papier, qui en flottant symbolisent à la fois une petite station orbitale, un télescope, un personnage au cordon ombilical coupé, et le mot "MOI", représentant le Moi de l’humanité libérée de la gravité. Une œuvre multi-facettes dégageant une grande force poétique dès l’instant où Thomas Pesquet la lâche face à la caméra et vole avec elle jusqu’à la fameuse Cupola : le lieu privilégié d’observation de la Terre.
Télescope intérieur dans la cupola de la Station Spatiale Internationale. ©Thomas Pesquet, ESA, CNES
Rarement un film a si bien montré la naissance d’une œuvre. Dans une dramaturgie à la fois très construite et rêveuse, Virgile Novarina nous fait découvrir étape après étape les enjeux de cette œuvre, participer aux questionnements de l’artiste et de l’astronaute, pour finalement aboutir à une séquence silencieuse et magistrale : Thomas Pesquet et « Télescope intérieur » flottent en apesanteur, et la caméra, elle aussi en apesanteur, libère également les spectateurs de la gravité. Grâce à la magie du cinéma et au potentiel poétique de l’œuvre, ce film nous transporte vers de nouveaux horizons.
Joris Bossard
Bande annonce du film :
"Télescope intérieur, une œuvre spatiale d'Eduardo Kac" (35', Virgile Novarina, 2017, Observatoire de l'Espace du CNES)
Avec Eduardo Kac, Thomas Pesquet, Gérard Azoulay, Hugues Marchal et Thierry Duquesne. Réalisation Virgile Novarina. Une production de l'Observatoire de l'Espace du CNES, avec le concours de l’ESA et le soutien de la fondation Daniel et Nina Carasso.