Mais où est donc le centre de la France ?

Pour répondre à cette question intrigante, on pourrait imaginer découper une carte de la France selon ses limites précises et la faire tenir en équilibre sur une aiguille pour déterminer le centre de gravité de l’objet ainsi obtenu, non ? Mais en réalité, calculer la position du centre géographique de l’ensemble du territoire métropolitain, voire en intégrant l’outre-mer revient à calculer le centre de gravité d’une surface, dont on connaît le périmètre, sur un ellipsoïde, forme mathématique semblable à une sphère légèrement aplatie et aussi proche que possible de la surface terrestre. Cette méthode aujourd’hui utilisée par l’IGN - l’Institut Géographique National, expert en géodésie qui est la science des dimensions, de la forme de la Terre et de  son champ de gravité ‐ a été définie en 1980 par Jean‐Georges Affholder, ingénieur géographe polytechnicien. Avec une telle méthode, on devrait trouver un point et un seul ; toutefois, force est de constater qu'un grand nombre de communes revendiquent le titre de centre de la France !

Borne milliaire marquant le centre de la France à Bruère-Allichamps au XVIIIe siècle - Wikipédia sous licence CC

Remontons le temps pour découvrir l’histoire de cette question. La forme du territoire métropolitain s’apparente à un hexagone, polyèdre régulier à 6 côtés, inscrit dans un cercle dont le centre est le centre de gravité... oui mais, les frontières n’ont pas toujours été les mêmes. Ainsi aux temps des conquérants romains, le centre de la gaule selon Jules César se situe à la frontière du territoire des Carnutes, territoire qui s’apparente alors à un losange[1]. D’aucuns le verront ensuite vers Chartres ou Paris, voire Saint-Denis selon le rôle central et géopolitique, mais dès le XVI^e siècle mention est faite d’un arbre « au centre de la France » situé aux frontières du Berry, du Bourbonnais et du Limousin (tantôt vers Issoudun, voire Bourges). Au XVIII^e siècle, le choix est fait d’un repère officiel, avec la borne miliaire de Bruère-Allichamps dans le Cher, selon les calculs du géographe Adolphe Joanne du plus petit quadrilatère contenant la France. Un choix dès lors contestable par des calculs plus précis redéfini après-guerre vers Saulzais-le-Potier par le mathématicien et astronome l’abbé Théophile Moreux. En 1966 ce sera à Vesdun, distant de quelques kilomètres, puis Chazemais dans l’Allier en tenant compte du territoire corse. Depuis l’IGN a confirmé la localisation à Vesdun pour la métropole et à Nassigny avec la Corse.

Il est amusant de constater qu’avec cette définition, chacun des départements peut calculer son centre géographique et qu'il s’avère souvent proche de son chef-lieu : logique si on se souvient qu’à la Révolution française, les départements ont été délimités selon le temps d’une journée de transport en calèche... alors qu’aujourd’hui, c’est une vue bien déformée de notre territoire selon les temps de transport que nous proposeraient la vision anamorphosée des mathématiques.

Anamorphose de la France selon les temps de transport en train. Crédit SNCF/ laboratoire Images Villes Environnement - CNRS/Université de Strasbourg

Cherchez-le vous-même

Collez la carte de France sur un carton et découpez-la selon les frontières : le centre en sera le point d’équilibre de votre modèle sur une pointe, aussi appelé barycentre. Mais s’il fait beau, prenez votre bâton de géographe pèlerin et votre GPS pour visitez les barycentres de vos territoires selon la liste calculée par l’IGN ci-dessous :
 

 
Tableau de données extrait du site IGN. Retrouvez toute l’actualité et des clefs pour comprendre le monde de l’information géographique et forestière avec Repères, le webzine de l’IGN