Les ultrasons et les agents de contraste ultrasonore pour...

Publié par Jean-Michel Escoffre, le 19 juillet 2024   19

Cette article est rédigé dans le cadre du projet IRIS, financé par l'APR-IR de la Région Centre-Val de Loire et en collaboration avec le laboratoire du GREMAN/CNRS/INSA/Université de Tours, le laboratoire GICC/Université de Tours, la Société Vermon SA et Centre-Sciences, structure régionale de CSTI. Ce projet vise à développer un protocole de délivrance d'une molécule thérapeutique, l'interleukine-12, par sonoporation, guidée par échographie, pour stimuler la réponse immunitaire contre le mélanome. Pour atteindre cet objectif, nous développons et validons une nouvelle sonde échographique qui permettra de réaliser la sonoporation sous le contrôle de l'imagerie échographique.

...diagnostiquer le mélanome

Echographie
Echographie

L'échographie de contraste ultrasonore consiste à administrer une solution d'agents de contraste ultrasonore (appelés également microbulles) dans le sang des patients. Un gel échographique (solution d'eau gélifiée) est appliqué sur la peau du patient au niveau de l'organe que le médecin souhaite explorer. Puis une sonde échographique est positionné sur le patient. Les ultrasons produits par cette sonde se propagent dans le tissu du patient. Lorsque les ultrasons rencontrent les agents de contraste ultrasonore présents dans le sang, ils sont réfléchis par ces agents. Le médecin pourra alors voir le sang qui circule dans le tissu ou l'organe.

Echographie haute résolution d'un mélanome cutané primaire

Complémentaire à l'échographie conventionnelle (dite à haute résolution), l'échographie de contraste ultrasonore est une technique d'imagerie non douloureuse, qui permet de détecter et caractériser le mélanome cutané primaire ainsi que le mélanome métastatique. En effet, l'échographie à haute résolution fournit essentiellement des caractéristiques morphologiques (comme les dimensions et le volume). L'échographie de contraste ultrasonore fournit des informations plus précises et plus sensibles sur les vaisseaux sanguins qui irriguent le mélanome alors que l'imagerie Doppler ne le permet pas. Cette technique d'imagerie est très prometteuse pour détecter spécifiquement la présence de métastases dans les ganglions lymphatiques mais aussi pour mesurer le pouvoir métastatique du mélanome. Elle a permis de déterminer plusieurs caractéristiques spécifiques de la circulation sanguine entre les tissus sains (comme le foie et la vésicule biliaire) et les foyers métastatiques. Les performances de l'échographie de contraste ultrasonore démontrent que l'échographie de contraste ultrasonore permettrait le diagnostic précoce du mélanome cutané primaire et du mélanome métastatique et la mise en place d'un traitement précoce et le plus approprié pour le patient. Aujourd'hui, ces résultats doivent être confirmés dans des études cliniques de plus grande ampleur.

...guide les traitements

L'échographie de contraste ultrasonore peut également guider des interventions cliniques, notamment la biopsie et la chirurgie. Ainsi, la biopsie guidée par échographie de contraste ultrasonore fournit un diagnostic histologique précis du mélanome par biopsie des zones tumorales irriguées par le sang. En plus de l'échographie conventionnelle réalisée pendant l'opération chirurgicale, l'échographie de contraste ultrasonore fournit des informations précieuses sur la perfusion pour aider les chirurgiens à mieux distinguer les tissus sains du mélanome. De plus, cette technique d'imagerie est très sensible et précise pour évaluer les changements vasculaires précoces induits par les traitements ciblant les vaisseaux qui irriguent le mélanome. Des études cliniques complémentaires sont nécessaires pour évaluer et améliorer les performances de l'échographie de contraste ultrasonore dans la supervision des interventions diagnostiques et thérapeutiques.

...pour administrer des médicaments

La combinaison d'ultrasons et de microbulles de gaz constitue également une méthode facile à utiliser et rentable pour la délivrance locale et non invasive de molécules chimiothérapeutiques, d'agents photothermiques, d'antigènes associés au mélanome et de molécules immunomodulatrices dans le mélanome. Cette méthode s'appelle la sonoporation. Ce processus permet d'augmenter la perméabilisation des vaisseaux sanguins à ces molécules, facilitant ainsi leur accumulation dans la tumeur uniquement sans induire d'effets secondaires sur les tissus sains. Cette méthode permet de traiter les mélanomes cutanés primitifs et métastatiques sous le contrôle de l'échographie. Cependant, nous devons garder à l’esprit que les études actuelles sur l’efficacité de la délivrance de molécules thérapeutiques par sonoporation ont été principalement décrits sur des modèles animaux de mélanome primaire et métastatique. En effet, aucune preuve de concept n’a été validée à ce jour dans des études cliniques. De plus, malgré des résultats prometteurs, nous devons nous interroger si la délivrance de molécules thérapeutiques par sonoporation est pertinente pour le traitement du mélanome cutané primitif. En effet, l’exérèse chirurgical du mélanome primaire est peu invasive, efficace et sûre. Cependant, l’activation et/ou la stimulation de la réponse immunitaire anti-tumorale par la délivrance d'antigènes anti-mélanome et de molécules immunomodulatrices par sonoporation a donné des résultats prometteurs pour le traitement des mélanomes métastatiques. Les données actuelles devraient être confirmées dans un avenir proche sur des modèles animaux de mélanome métastatique avant d'être étudié chez l'homme.

Par Jean-Michel Escoffre